LAMART Michel

Paroles en l’air

Auteur : LAMART Michel

Quels rapports entre poésie et chanson ? Le texte parfois. Et toujours la volonté de toucher par la grâce immédiate de la parole vive. Bref ! Une tradition ancienne.

Guillevic, dans un texte retrouvé « Les poètes et la chanson » (repris in Ouvrir, Gallimard, 2017, p.309), considère la chanson comme « un moyen d’expression des aspirations populaires » moins « élitaire » que le poème. Il en conclut qu’il vaut mieux que « les paroles des chansons soient des textes de qualité. » et, donc, qu’il est « préférable que les poètes s’en mêlent. »

Très jeune, j’ai commencé à composer (paroles et musiques) des chansons avant de me mêler d’écrire de la poésie. On vérifiera, dans ce choix qui constitue une anthologie personnelle, si la réciprocité du point de vue exprimé par Guillevic se vérifie.

michel lamart

ISBN : 978-2-35082-420-8

nombre de pages : 100

format : 14 x 20 cm

10,00

Description

Je n’ai jamais considéré, comme un certain, que la chanson était un « art mineur ». Pour moi, les catégories de « mineur » et de « majeur » relèvent moins du goût du public que de la volonté d’exclure des pratiques culturelles le plus grand nombre (la classe populaire, en général !) en flattant l’élite (!) dans le sens du poil idéologique par ce genre de marqueur discriminant. Ainsi, on oppose poésie/chanson, musique savante/variété, littérature populaire/grande littérature, etc.. Exclusion et discrimination ne font pas partie de mes valeurs. En revanche, en musique, ces notions ont un sens. En général, les chansons tristes sont composées sur des accords mineurs, les chansons plus gaies en majeurs. Je laisse au lecteur le soin de deviner la musique qui convien(drai)t le mieux aux textes qui suivent…

Papa m’a donné très tôt la passion de la chanson. Il aimait chanter a cappella les airs de sa jeunesse à la fin des repas de famille. C’était la tradition à l’époque : on chantait après avoir fait bonne chère. Berthe Sylva et Tino Rossi jouissaient d’une place de choix dans son répertoire. Pendant la guerre, parmi ses camarades de combat, il avait son public d’admirateurs fervents. On l’avait affublé du nom de son idole, Tino. Papa fera, plus tard, partie du peloton d’exécution de Laval. C’est dire, pour le coup, s’il savait changer son fusil d’épaule! Mon grand-père paternel connaissait par cœur, lui aussi, les succès de son époque (J’suis beau, Du gris…).

Mes parrains à moi sont Brassens et les Beatles. Le premier pour les textes, les seconds pour la mélodie, les harmonies vocales et le rythme. Dylan est venu très tôt, via la voix (légèrement voilée) d’Hugues Aufray, me tirer du musette qui endimanchait la maison. J’ai commencé à souffler dans un harmonica avant de m’y prendre comme un manche avec la guitare. Bref ! C’était sixties, six cordes et rock n’roll. J’ai commencé à écrire des chansons vers 14, 15 ans. D’abord à l’harmonica (sic). Puis à la guitare achetée d’occase à un copain du voisinage. J’imitais l’homme de Sète qui, pour moi, en valait dix. Mes parents craignaient que je néglige mes chères études. Ils voulaient que j’échappe à la malédiction de classe prolétarienne en ne suivant pas la même route qu’eux (les braves gens !) vers l’usine. À l’époque, l’ascenseur social n’était pas (encore) en panne. Et les instits, souvent communistes, avaient fait, comme Papa, de la Résistance. Ils nous donnaient des armes pour nous battre dans cette chienne de vie. Ils appelaient ça de l’instruction. Ils avaient même décelé en moi quelques compétences…