VÉRILHAC Françoise

Uppercut, sur le ring, pulse poésie

Auteur : VÉRILHAC Françoise

Aux pauvres benets qui voyaient dans le slam le renouveau et la quintescence de la poésie contemporaine, je disais déjà vous êtes de pauvres benets. A ceux qui ne voient dans le slam, maintenant qu’on n’en parle presque plus, qu’un avorton raté du rap, je dis il y a tout de même de ci de là quelques voix qui résonnent et puis ces moments de chaleur autour de la parole, ce n’est pas rien tout de même.

En 2009 Gros Textes publie Uppercut, sur le ring, pulse poésie.

Nombre de pages : 70p
Format : 14 x 14 cm

7,00

Description

Extrait :

UNE HISTOIRE

C’est quoi c’t’histoire ? C’est quoi ?
C’est quoi c’t’histoire ?
C’est quoi ?

C’est une histoire de réconciliation des paramètres
C’est une histoire de reconstitution de l’être
Avec ses composants.

C’est l’histoire d’un crédit qu’on devrait s’accorder
C’est remonter sans fin la pente lisse et seule de sa nécessité
C’est tordre les complexes et accepter pour l’heure ce de quoi nous sommes faits
C’est ne plus communier aux autels contrefaits
C’est une faiblesse en force qui viendrait prendre ses aises
C’est la résolution qui bout sous le malaise
C’est la pensée qui pousse l’heure du déversement
C’est une histoire de plus : toujours des agencements
Toujours des agencements
Un Rubix cube rugueux et rien que des doigts gourds
C’est une histoire d’armures, c’est une histoire d’amours
C’est soyeux comme une plume et rêche comme un poncif
C’est une histoire de ouf, c’est histoire de pif.

C’est quoi c’t’histoire ? C’est quoi ?
C’est quoi c’t’histoire ?
C’est quoi ?

C’est une histoire de borgne qui s’prend entre quatre yeux
Ou d’aveugle qui se cogne, c’est une histoire d’aveux
C’est l’audace de nommer ce qui est innommable
Avec doute, avec pleutre et avec componction
C’est s’abreuver à l’auge d’anesthésies coupables
C’est renifler le flot de son inspiration
C’est s’en remettre aux vagues du désir sur la grève, aux déferlantes salines, à la beauté des rêves
C’est prendre à pleines poignées le semis des redites et puis planter son soc dans un champ lexical
C’est cramer les créneaux, limer le piédestal
C’est arrêter de croire que tout va être bouclé, que tout doit être bouclé avant même d’éprouver sa propre pertinence
C’est se mettre au travail au-delà de l’idée et de la récompense
C’est se dire que l’amorce viendra de l’intérieur et que le feu aux poudres est rarement reluisant
C’est l’histoire de nos doutes, de nos pluies, de nos pleurs
C’est une histoire qui saoule, c’est une histoire qui sent.

C’est quoi c’t’histoire ? C’est quoi ?
C’est quoi c’t’histoire ?
C’est quoi ?

C’est une histoire d’argile dans les pieds du colosse
C’est une histoire d’Achille et de talons véloces
C’est pour crever la panse au mode productif
C’est monter, c’est descendre, c’est s’arracher les tifs
Et fissurer sans fin des socles d’habitudes
C’est cracher dans ses mains le pain marabouté de toutes ses certitudes
C’est regarder comment le besoin de l’oubli ratisse obstinément son allée de stigmates, pour s’raconter aut’chose
C’est là-bas si j’y suis, c’est viens-y si tu l’oses
C’est creuser le fossé de tout c’qui nous sépare
C’est combler le fossé de tout c’qui nous sépare
C’est tout au fond des plis, c’est tout au fond d’l’espoir
C’est l’élément premier, le déclencheur intime, l’interrupteur connexe
C’est la nudité d’être, le creuset d’où le cri finit par apparaître
C’est pouvoir tout plier, faire des mains et des pieds, se brûler, se gracier
En crues sédimentées de gesticulations, en dépôts d’alluvions, en drapeaux d’illusions et d’innocence perdue
C’est pas qu’une histoire drôle ou une histoire de cul
C’est l’histoire de toto au logis des hasards
C’est l’histoire de nos vies
Mais qu’est-ce que c’est qu’c’t’histoire ?
Tout l’toutim à tâter tout au fond du tiroir
C’est l’histoire de nos vies
Mais qu’est-ce que c’est qu’c’t’histoire ?

C’est une histoire de reconstitution des paramètres
C’est une histoire de réconciliation de l’être
Avec ses composants.

Damien Noury